On est au début du siècle. Pas celui-ci, l’autre. Dans les Pyrénées, le temps des conquêtes tire sur la fin.
Un groupe de montagnards, jeunes et aventureux sillonnent activement la chaîne à la recherche de quelques exploits. Ils ont peu de choses à se mettre sous la dent.
Le ménage ayant été fait avant eux.
Plus aucun grand sommet n’attend son maître. La plupart ont même déjà été gravis en hiver … mais à pied.
L’arrivée du ski tombe fort à propos pour étancher la soif de ces jeunes et véloces arpenteurs de montagne.
C’est grâce à eux que le ski de rando fera une entrée fulgurante dans les Pyrénées.
Un homme, Henri Sallenave sera le précurseur de cette discipline nouvelle.
C’est un palois, montagnard et chasseur. Selon les oui-dire, existe en Norvège un moyen de se déplacer sur la neige avec des planches de bois. Le catalogue Manufrance en fait la publicité. Derechef, il commande. Le 5 novembre 1903, son colis arrive en gare de Pau. C’est au Benou en vallée d’Ossau, qu’il effectue ses premières glissades. Le dimanche suivant, il s’attaque seul au Pic de Ger. Gonflé le bonhomme.
Conquis, il en parle dans son cercle d’amis. Le cours de l’histoire va alors s’accélérer.
Le 7 décembre, Louis Falisse, belge de son état et violoncelliste de profession, exerce ses talents au Palais d’Hiver à Pau.
Il s’essaye à cette nouvelle discipline sur les pentes du Gourzy, au-dessus de Laruns. Le 27 décembre, en compagnie de Larregain ils effectuent le premier tour complet hivernal du Pic du Midi d’Ossau. Le 30 décembre soit 3 jours plus tard, Louis Robach se rend à Cauterets avec des « potes » et sous les yeux incrédules et amusés des habitants monte au Lac de Gaube à ski. Il passera trois jours dans la remise de l’auberge. C’est en quelque sorte, le premier raid de l’histoire pyrénéenne du ski.
Louis Robach, dentiste dans le Gers, sera le tombeur des sommets à ski.
Également photographe, on lui doit quelques beaux clichés de cette époque pionnière.
Il apprend le 22 janvier 1904 que le sommet du Mont Blanc est foulé pour la première fois par des skieurs. Piqué au vif, il vise l’Aneto. Le 4 avril 1904, il quitte nuitamment Luchon en compagnie de ses amis Aubry, Falisse, Heid et Basset. Douze heures leur sont nécessaires pour passer le port de Vénasque. Nuit à l’auberge de Cabellud aujourd’hui en ruine. Le lendemain, le sommet est défloré par Robach et ses amis. À la descente, notre arracheur de dents fait une mauvaise chute. Entorse. Handicapé mais pugnace, il rejoint tant bien que mal Luchon.
Dès lors, rien n’arrêtera la folie de conquêtes.
Le 15 mai 1904, Falisse et Sallenave sont au sommet du Vignemale.
Le 1er janvier 1905, fiesta du nouvel an à l’Observatoire du Pic du Midi, par les mêmes en compagnie de Marcel Bourdil, auteur à la plume acérée comme des carres de ski.
Seul le Mont Perdu résistera. Le 5 mars 1905, il est tenté par Tuquerouye. C’est l’échec. Falisse a les doigts gelés. Le 23 avril, nouvelle tentative et nouvel échec sous le col du Cylindre, La victoire sera pour le 4 juin 1906 mais en passant par la brèche de Roland. Robach et l’abbé Gaurier ont rejoint Falisse dans cette folle épopée.
Pour assurer la propagation de ce sport nouveau, il ne manquait qu’une chose, des skis.
Louis Falisse rendra la chose possible en laçant la première fabrique pyrénéenne de skis. Le nom de marque est tout trouvé. Ils s’appelleront « Isard »
Détail curieux mais sur le fond logique, le prix est fonction de la longueur.
La mayonnaise prend.
Les Pyrénées deviennent le théâtre de concours internationaux. Le premier se déroule aux Eaux-Bonnes les 15 et 16 février 1908. Les trains au départ de Pau sont bondés. Les Suisses et les Norvégiens brillent aux épreuves de saut. La présence du roi d’Espagne, Alphonse XIII, donne par sa présence à l’édition de 1909 un lustre extraordinaire à ces rassemblements.
Les stations thermales, notamment les Eaux-Bonnes et Cauterets tiennent une place essentielle dans la promotion du ski dans les Pyrénées.
Outre leur renommée internationale, ces stations présentent l’avantage d’offrir une importante capacité d’hébergement, des routes d’accès bien entretenues et, pour Cauterets, son chemin de fer électrique fonctionnant à l’année.
À la veille de la première guerre mondiale, la démocratisation du ski n’est pas à l’ordre du jour .
En 1912, Luchon, inaugure son train à crémaillère qui monte à 1800. Il est destiné à desservir le futur palace de Superbagnères, C’est la première remontée mécanique des Pyrénées.
En 1913 à Font Romeu, le grand Hôtel accueille une richissime clientèle qui vient goûter dans le luxe, aux joies des sports d’hiver.
Aujourd’hui, l’eau a coulé sous les ponts.
Ski de rando, ski de piste et ski de fond suivent des destinées séparées.
L’industrialisation du ski dit alpin nécessite le recours à de la neige artificielle. Le ski de fond est tombé en désamour. La raquette a, en partie, pris sa place. Quant au ski de rando, les Pyrénées restent pour lui un magnifique terrain de jeu, injustement délaissé.
Par Gérard Caubet
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Il reste quand même pas mal de gens qui continuent à faire du ski de randonnée dans les Pyrénées. C’est vrai qu’on voit de plus en plus de raquettes mais la cohabitation existe et il en faut pour tout le monde.
excellente publication qui remet à son rang les pyrénéistes souvent dépréciés par les alpins.
sait on le nombre de paires de ski produites par louis Falisse merci de votre réponse.
Bonjour, merci de votre commentaire. Nous n’avons pas d’informations à ce sujet.