L’HISTOIRE DE LA FOLLE DES PYRENEES
1 er épisode
Au début de l’année 1814, alors que la France est sujette aux pressions prussienne à l’est et à celles hispano-anglo-portugaise au sud. L’Ariège occupant le centre du massif pyrénéen qui possède sa plus grande largeur à cet endroit (120kms), se présente donc comme un véritable rempart naturel qui se dresse contre les mouvements militaires ennemis. Dans ce contexte, le 7 janvier 1814, les lecteurs du « Journal de l’Ariège »découvrent un article de Paul Bascle de Lagrège dont le récit relate des faits qui se déroulent dans un coin reculé de cette Ariège, précisément dans le haut canton de Vicdessos, aux confins de la France, de
l’Andorre et de l’Espagne.
L’article s’intitule : « Histoire d’une femme trouvée entièrement nue sur les hautes montagnes du canton de Vicdessos ». Cet article s’appuie sur des procès verbaux qui constatent les faits. Près du hameau de Suc au pied du Mont Calm. Au fin fond d’une vallée sombre et luxuriante de végétation, sombre et surplombée par de hauts reliefs, d’intrépides chasseurs se sont aventurés dans ces profondeurs et se trouvent pétrifiés d’étonnements en apercevant sur un versant de cette vallée une femme entièrement nue ! Grande, sale, longue chevelure, elle est là debout sur un roc, mais après avoir poussé un cri d’effroi, elle prend la fuite à la vue de ces chasseurs. La nouvelle de cette découverte parvint au hameau de Suc et le lendemain de nombreux habitants se lancèrent à la recherche de cette pauvre femme, ils s’embusquèrent pour la surprendre et finalement s’en saisirent. Elle se débat, refuse les vêtements qu’on lui impose, alors on lui lie les mains, alors elle manifeste bruyamment son désaccord et sa colère ! Arrivée au presbytère de Suc, accueillie par le prêtre sa colère s’estompe pour faire place à l’abattement. Elle se tait et sa tristesse et son désarroi s’expriment par des larmes et des gémissements. La pauvre angoissée chancelle et elle tombe à genoux en prononçant ces paroles :
« Dieu ! que dira mon malheureux époux ». Ses larmes abondantes semblent la calmer, ensuite elle tombe dans l’indifférence. Elle s’est exprimée en français. Malgré son visage livide et décharné une noblesse semble s’échapper de son attitude et de ses propos. Le curé comprend que cette femme est étrangère, qu’elle n’appartient pas à la classe du peuple. Ce prêtre, ému, manifeste un vif intérêt et son affection pour cette mélancolique plongée dans de grands malheurs. Il l’héberge dans une chambre pour passer la nuit et prend des
précautions pour prévenir son évasion. Mais celles-ci s’avérèrent insuffisantes ! Car le lendemain, elle avait disparu !
Elle reparut quelques jours après sur la cime d’un pic accessible aux aigles et aux chamois, toujours aussi nue, les quelques hardes qui lui furent imposées, ayant été retrouvées abandonnées. Toutes les tentatives pour la reprendre demeurèrent infructueuses et les tentatives pour connaître son nom et son pays restèrent vaines.
On pense avec ses paroles qu’elle est l’épouse d’un Français et qu’ils passèrent en Espagne pour un long exil à la suite des évènements de la révolution française. Ce serait lorsqu’ils se résolurent à revenir dans leur patrie, en arrivant au pied des Pyrénées qu’ils trouvèrent des brigands qui les assaillirent, les dépouillèrent de tout et tuèrent le mari. La malheureuse qui supporta l’horreur sanglante de l’assassinat en perdit la raison et alors en proie à ses désordres mentaux, erra égarée sur les crêtes et dans les pentes des montagnes de ce coin perdu des Pyrénées ariégeoises. On la voit quelques fois cueillir des plantes sauvages, nager dans un lac, longer des torrents en quête de nourriture. Cependant l’hiver approche et le curé et les habitants s’inquiètent pour la pauvre femme. La neige recouvre les sommets et après que troupeaux et bergers aient rejoint les villages, la froidure s’installe et engourdit le pays. Va-t-elle survivre à cet hiver ?
Par Yannick Rolland, accompagnateur en montagne
Mais, ôte moi d’un doute , ne l’avons nous pas rencontrer , il y a longtemps du côté de la Sierra de Guara ?
Vite, la suite !!
Mlaure